Chez Oh! les Femmes, nous croyons au pouvoir des récits. Parler de règles, de santé intime ou encore de protections menstruelles durables, c’est avant tout partager des expériences, des émotions et des évolutions personnelles.
Dans ce témoignage, Ornela nous confie avec sincérité son parcours menstruel, du Cameroun à l’Europe, des serviettes artisanales à la culotte menstruelle. Un voyage du corps, du cœur… et vers une intimité choisie, respectée, libérée.
1. L’annonce rouge : mes premières règles au Cameroun
J’avais 9 ans. Petite fille encore, mais déjà femme, sans le mode d’emploi. C’était brutal. Je me souviens surtout de l’incompréhension. Personne ne m’avait vraiment préparée à ce bouleversement hormonal. Chez nous, les règles, c’était un sujet chuchoté entre sœurs, un peu honteux, un peu tabou. Moi, j’étais la cinquième fille d’une fratrie de huit, entourée de femmes… mais tellement seule quand c’est arrivé.
Ma mère, pragmatique, a réagi à sa façon : elle m’a donné un kit artisanal, préparé avec soin. Une grande serviette découpée en carrés, une dizaine de culottes bien serrées, un seau en plastique, et du savon dur, comme le savon de Marseille. C’était simple, rudimentaire, mais efficace. On lavait, on séchait, on repassait et on réutilisait. J’ai grandi avec ce rituel menstruel. C’était ça, mes premières lunes.
Un début de cycle menstruel à la fois naturel et ancré dans la débrouille.
2. Des tampons à la cup : voyage intime d’un corps en mouvement
Puis les choses ont changé. Au lycée, les serviettes hygiéniques jetables se sont popularisées. On les achetait à l'épicerie du coin, c’était la nouveauté "moderne". Plus besoin de laver. C’était libérateur… mais pas si confortable. Il y avait cette odeur tenace que je détestais, surtout quand les serviettes étaient parfumées à l’aloe vera. Une vraie galère. Je me lavais deux fois par jour, convaincue de "sentir". C’était plus dans la tête que dans le nez, mais c’était là.
Et puis, l’Europe. À mon arrivée, j’ai découvert les tampons (qui existaient déjà au Cameroun mais que je ne connaissais pas). Révélation : discrets, sans odeur, plus besoin de se cacher ou de changer ses sous-vêtements. Je me sentais libre, sexy même.
Mais quelques années plus tard, ma coloc – une vraie passionnée de santé intime et de bien-être menstruel – m’a ouvert les yeux sur la composition des protections classiques. Produits chimiques, dérivés de pétrole… mon corps méritait mieux.
Alors j’ai tenté la coupe menstruelle. Spoiler : échec total. Malgré tous les tutos YouTube et les conseils de copines, ça fuyait toujours. Pas pour moi. Même si je savais qu’elle faisait partie des solutions les plus écologiques en matière de protection menstruelle durable, ça ne collait pas avec mon corps.
3. Retour aux sources : quand mon copain m’a offert mes règles version 2.0
Un jour, mon conjoint (oui, le même qui est aujourd’hui mon mari 💛), est rentré d’une épicerie bio avec un petit sac surprise : serviettes lavables, culottes menstruelles, une nouvelle cup. Il savait que je cherchais des solutions plus saines. Et là, j’ai eu un flash : mais c’est mon kit d’enfance, en version améliorée !
Depuis, je ne jure plus que par les culottes menstruelles et les serviettes hygiéniques lavables. J’ai même un petit seau avec couvercle, comme avant. Je rince, je stocke, je lave à haute température, je repasse, je range. Ça peut sembler contraignant, mais pour moi, c’est doux, écologique, intime. Un rituel de soin. Un retour à moi.
Aujourd’hui, je vis mon cycle menstruel avec conscience, dans le respect de mon corps et de la planète.
4. Mes règles, aujourd’hui : ni ennemies, ni invisibles
Je n’ai jamais eu de règles très douloureuses. Je touche du bois. Parfois un petit inconfort, une envie de m’enrouler dans un plaid et d’hiberner. Et parfois, cette sensation étrange qui tire du ventre jusque dans mes cuisses, comme si mon corps me disait : "Hey, ralentis."
Ce que j’ai appris, c’est que chaque corps a son rythme, son langage. J’écoute le mien. Je lui parle douceur, chaleur, repos. Je ne fais pas de sport pendant mes règles. Je me fais du bien. Et surtout, je ne me cache plus.
En bref : mes règles ont longtemps été une énigme. Puis une gêne. Aujourd’hui, elles sont devenues un rendez-vous avec moi-même. Intime, vivant, imparfait.
Mais plus jamais honteux.
Photo sources : pexels-sora-shimazaki-5938410
Pour plus de lectures :
Journal de Yasmina : Ma vie avec mes règles